La pensée du jour
Mais que signifie : risquer sa vie ? Comment est-ce possible, étant vivant, de penser ce risque ? Le penser à partir de la vie et non de la mort ?
Risquer sa vie, est-ce nécessairement affronter la mort – et survivre… ou bien y a-t-il, logé dans la vie même, un dispositif secret, une petite musique à elle seule capable de déplacer l’existence sur cette ligne de front qu’on appelle désir ?
Anne Dufourmantelle – L’éloge du risque
Le cadeau du jour
« Ce qui me frappe, moi qui ne crois pas appartenir au «cercle de la raison», c’est que l’on trouve raisonnable justement que 200 personnes soient aussi riches que 3 milliards dans ce monde.
Ce qui me frappe c’est que l’on trouve raisonnable de ne pas donner raison aux sages femmes de ce pays qui, depuis plus d’un an, ne font pas grève pour le plaisir mais pour obtenir des conditions de travail décentes.
Ce qui me frappe, c’est que l’on trouve raisonnable de ne pas satisfaire la demande justifiée des auxiliaires maternelles en crèche ou des infirmières, rincées par le sous-effectif, car ce sont elles qui sont en première ligne sur le front de notre sacro-sainte égalité.
Ce qui me frappe c’est que l’on trouve raisonnables les méthodes managériales qui poussent tant de gens à souffrir au travail et parfois à en finir, ce qui me frappe c’est de trouver raisonnable de continuer d’appeler Europe ce grand projet de liberté et de paix éclairées, la technocratie Bruxelloise.
Martin Buber a écrit que c’est en rendant impensable toute alternative à un ordre des choses qu’on participe à une hégémonie qui a pour propriété de susciter la violence et la destruction. La doxa qui consiste à ostraciser toute pensée transversale à une orthodoxie couve une menace.
On a vu comment «le cercle de la raison» a pondu en une trentaine d’années un parti qui a la peur pour patrie et le ressentiment pour exutoire. Parce que le devoir de faire barrage à cette réaction vindicative était le plus sûr moyen pour ce «cercle» de se répliquer au pouvoir ?
Les cercles ne sont pas seulement creux, il leur arrive d’être vicieux.
Anne Dufourmantelle – Chronique Philosophique – Le cercle vicieux »