La pensée du jour
Je connais bien le sentiment de tristesse qu’inspire la précarité de toute chose, je l’éprouve à chaque fois qu’une fleur se fane. Mais il s’agit là d’une tristesse sans désespoir.
Herman Hesse
L’humeur du jour
Hier soir, on a loué « Samba ».
J’adore Omar Sy, son sourire si généreux qui illumine tout.
J’aime Charlotte Gainsbourg, sa mélancolie forte et fragile, sa beauté qui défie toute joliesse.
Il parait que le film est drôle et j’ai rien contre une bonne marrade.
J’ai tenu 4 minutes (oui, je retenterai)
Le regard d’Omar quittant son petit boulot, puis debout dans le métro m’a renvoyé à la réalité des sans papiers, des laissés pour compte, des précaires, des non visibles de façon trop violente.
Je déteste la violence réaliste dans les fictions.
Ça me donne la nausée. Ça me fait gigoter sur mon siège. Ça me fait quitter la salle ou changer de chaine.
Et là, cette tristesse insondable dans les yeux d’Omar…
Ça m’a renvoyée à mon dernier trajet Vélib, de la gare du Nord vers le Trocadéro.
En 25 minutes ce matin là, j’avais croisé des SDF installés devant les grands magasins, dont un qui s’était fabriqué une sorte de fauteuil et regardait passer la vie autour de son chat tenu en laisse,
J’avais dépassé les boutiques de l’avenue Montaigne, ponctuée de Ferraris et autres bolides dorés (si si)
puis contourné le petit groupe de dormeurs habituels de la grille de métro, au pied du Musée Guimet,
aperçu un homme qui cherchait ses repas à venir dans les poubelles.
Et puis un autre enfin, juste devant la borne de la rue de Longchamp, endormi dans sa voiture/appartement.
Quand je suis ressortie de ma réunion quelques heures plus tard, le quartier avait changé. Les pauvres avaient laissé la place aux fourrures de tous poils, aux accessoires de marque, aux touristes, aux fronts botoxés et aux bouches en plastique.
Plus de pauvres.
Plus de précaires – pour ça, il faudra éviter le Bus 63 et préférer le métro. Ou revenir après la tombée de la nuit.
La douce illusion qu’il n’y a pas de crise, qu’on peut partager richessed et travail avec ceux qui ne sont pas nés dans un pays suffisamment nourricier…
que chacun peut gagner sa pitance avec dignité, qu’on peut tirer fierté et picaillons de son labeur.
D’un vrai travail. Pas de l’exploitation, pas du « à la petite semaine ».
Du coup, on a regardé Hippocrate.
Oui…
Parfois je suis maso.
Pooky ou Vivre les yeux ouverts
Et faire ce que nous pouvons, même si ce n’est pas grand-chose…