Et je pèse mes mots...

Le crépuscule des Vieux


La pensée du jour
O rage ! O désespoir ! O vieillesse ennemie ! N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?
Pierre Corneille

L’humeur du jour
« On peut dire tout ce qu’on voudra sur la vieillesse. Ca vaut mieux que d’être mort » écrivait Stephen Leacock.
Sans même évoquer les cas graves d’Alzheimer, Parkinson ou autres maladies invalidantes, je suis tentée de moduler cette citation.
J’ai entendu dernièrement beaucoup de témoignages de placements de parents ou de grands-parents en résidences spécialisées. Décisions douloureuses, parfois culpabilisantes, toujours indécemment couteuse pour les familles – 1800 euros minimum par mois pour un 8 à 12 m2, dans ce qui ressemble plus à un asile qu’à une résidence, c’est beaucoup trop pour des retraités ou des « pensionnés » qui végètent à 1200 euros. Pour les plus indigents, restent les chambres partagées ou l’hospice.

Ça n’arrive pas qu’aux autres. Il suffit d’être seul, veuf ou célibataire, de ne pas avoir de famille capable de vous accueillir, d’avoir perdu un peu d’autonomie physique, de souffrir de troubles de la mémoire, de présenter un danger pour soi-même ou pour les autres, d’être estimé incapable de rester seul chez soi … liste non exhaustive.

Culpabilité et souffrance pour la famille.
Mais j’ose à peine imaginer ce que je ressentirais si un jour « on » me faisait quitter « ma » maison pour une chambrette dans une résidence aux compagnons imposés. Car même si mon corps devenait plus lent, moins réactif, moins fiable, tant que mon esprit resterait vif, comment supporter ce double emprisonnement, celui de mon être dans un corps fatigué et de ce corps dans un internat dont des ados ne voudraient pas ?

Qui peut avoir comme ambition de fin de vie d’être infantilisé, avec la mort comme ultime libération ? C’est un état qui rendrait fou n’importe quelle personne un tant soit peu attachée à son autonomie.
On vit de plus en plus vieux, la France s’enorgueillit de compter presque 15 000 centenaires, il est temps de nous pencher sur la qualité de vie qui leur est réservée, de considérer ces aïeux comme des anciens « nous mêmes », avec des envies, de la fantaisie, des idées, un vécu plutôt que de considérer qu’il leur suffit d’un poste de télé, 3 repas dont ils ne décident pas servis à heures fixes et des visites hebdomadaires ou mensuelles.

Le cadeau du jour
les jeunes sont des futurs vieux

13 réflexions au sujet de « Le crépuscule des Vieux »

  1. ça me choque aussi l’indécence et la misère dans laquelle on laisse « nos » vieux, l’état de solitude aussi de certaines personnes âgées.

  2. on m’a raconté l’histoire de deux vieilles dames, deux soeurs, qui vivaient chez elles, dans un appartement, en tirant un peu le diable par la queue, bénéficiant de la gentillesse des voisins
    pas d’enfants, rien
    lorsque l’ainée est morte, la cadette s’est vue contrainte de payer des droits de successions qu’elle ne pouvait pas honorer ou bien… quitter les lieux
    avec sa pension miteuse, elle s’est retrouvée à l’hospice, alors qu’elle avait travaillé et mené une vie honorable et surtout, qu’elle aurait été capable de rester chez elle
    comment aurait elle pu relouer ou racheter, avec son grand âge?

  3. C’est choquant cette façon de mépriser les personnes âgées, de les considérer comme moindre, de ne plus leur accorder le même respect sous prétextent qu’ils ont pris de l’âge

  4. Ca me rappelle des souvenirs douloureux cet article si bien fait pooky..

    Même ceux qui souhaitent aller dans une maison de retraite le regrette souvent ce choix après ..

    C’est tellement déstabilisant de partir de chez soi , et de quitter des lieux remplis de souvenirs ..
    Même une maion de retraite au coût assez onéreux ne remplace jamais ces lieux

    Et pourtant parfois il faut se résoudre à le faire ce choix …

    Mais les cas , et les situations sont tellement différentes..
    Qu’on ne peut surtout pas culpabiliser certaines familles de faire ce choix
    Qui n’en ai jamais vraiment un de choix ….

  5. Ton article est beau et tellement vrai ! Il ne fait que confirmer mon avis tant il est vrai que les « vieux » ne comptent plus dans notre société…

    C’est désolant, triste, injuste et surtout cruel … Où est la compassion et l’humanité là-dedans ? Je m’interroge …

    Les Africains respectent leurs « vieux » et s’en occupent et ne les abandonnent pas … Il y a une phrase qui dit : « quand un vieux meurt c’est une bibliothèque qui brûle ! »

    Les vieux ce sont d’anciens jeunes et n’oublions pas que nous sommes de futurs vieux …

    J’aime beaucoup le portrait jeune/vieux !
    Merci

    Bisous

  6. Rien que le mot « vieux » m’angoisse !!!! J’y viens, j’y suis…qu’est ce qu’une vie ? Fait on les bons choix ? Quand on a la chance d’avoir des enfants, on essaie de les élever du mieux possible pour leur donner le meilleur afin qu’ils aient eux aussi la meilleure vie possible….A peine partent ils de la maison que vous réalisez que votre vie est bien entamée….la retraite sonne, quelques années pour souffler un peu et vous voilà arrivés dans la tranche « vieillesse »….et la peur de déranger à notre tour ces enfants que nous chérissons et avons tant de mal à quitter, surtout définitivement….Quand ce moment douloureux arrivera, j’aurais la chance de les avoir près de moi. Cette idée me rassure un peu.Ce que je souhaite et espère : ne pas trop les perturber, les déranger à mesure que le temps passera. J’essaierai de faire ce que j’ai toujours fait : ne pas les embêter. je veux partir dignement.

    Pooky merci pour ce beau texte, mais parle nous de choses un peu plus gaies la prochaine fois, tu me donnes le bourdon !!!!!

  7. tellement triste et tellement vrai…
    Je me dis parfois que devant ce qui nous attend,pas étonnant que certains préfèrent « perdre la tête ». Au moins ils ne voient plus cela.

  8. Merci Pooky pour cet article. Je suis constamment auprès de personnes âgées et je vois la détresse de certaines. Faire le choix de rester à maison ou partir en résidence n’est pas simple. Certaines pensent qu’en restant chez elles, elles seront mieux entourées par leurs enfants mais je peux te dire qu’il n’en est rien. Des personnes âgées ont leurs enfants à côté et ils ne viennent même pas voir si leurs parents ont besoin de quelquechose ou même passer un petit moment pour briser cette solitutde si grande quand la personne âgée a perdu son conjoint.
    Des journées entières à se demander s’ils vont avoir cette visite tant attendue , des dimanches tout seul. Heureusement, certaines personnes âgées bénéficient de l’aide à la personne et savent que tel jour, que quelqu’un sera là pour leur apporter un peu de chaleur humaine (qui fait tant défaut dans des familles) un sourire et de l’attention.
    Cela me rend triste quand je pense à ma propre vieillesse, serai-je comme ces « vieux » à attendre la visite de mes enfants assise sur une chaise, attentive au moindre bruit de voiture ou de porte qui s’ouvre. Me projeter dans cet avenir ne me réjouit pas quand des personnes âgées me disent attendre la mort car elles en ont assez d’être seules. Il faut apporter toute notre attention et de la chaleur humaine aux personnes âgées, leur rendre la fin de vie la plus heureuse possible.

  9. jai envie de faire un copié collé de ce que Mom a écris(j’espère qu’elle ne m’en voudra pas )
    Mais Ca colle tellement a ce que je ressens quand je pense a la vieillesse et à ma vie :

    « et la peur de déranger à notre tour ces enfants que nous chérissons et avons tant de mal à quitter, surtout définitivement….Quand ce moment douloureux arrivera, j’aurais la chance de les avoir près de moi. Cette idée me rassure un peu.Ce que je souhaite et espère : ne pas trop les perturber, les déranger à mesure que le temps passera. J’essaierai de faire ce que j’ai toujours fait : ne pas les embêter. je veux partir dignement. »

    et j’ai envie de rajouter :

    « J’espère que quand je ne serai plus là ils penseront que j’ai fais le mieux possible pour qu’ils soient heureux ..
    Et qu’ils le seront heureux et digne après mon départ … »

  10. Tu as écouté l’émission de Mermet cet après-midi ? Il a recueilli la parole des soignants et des personnels de ces maisons de retraite hors de prix, c’était passionnant.
    Aujourd’hui nous avons « marchandisé » la vieillesse et la dépendance, au même titre que l’éducation ou tout autre aspect du monde, malheureusement.
    Par le passé, ça n’était pas forcément mieux, contrairement aux idées reçues, les vieux n’étaient pas forcément mieux traités au sein des familles. Ils étaient un poids, une bouche à nourrir sans avenir, il faut s’en souvenir je crois.
    Et c’est pour cela que tu as raison, il serait temps de se préoccuper de trouver une 3ème voie, une autre façon de s’occuper de nos aïeux, mais aussi de nos enfants, de nos fragiles, de nos dépendants, et de réaliser combien ils nous sont précieux.

  11. C’est cela qu’on a tendance à oublier « les jeunes sont de futurs vieux » … la perte d’autonomie, qu’lle soit physique ou intellectuelle (sans être fataliste), nous arrivera à tous un jour ou l’autre. Profitons d’aujourd’hui car on ne sait pas de quoi sera fait demain !

    En tous les cas, je suis d’accord avec ce que tu dis Pooky. Je l’avais lu à l’époque de la publication mais je ne savais pas comment réagir.

Chic ! Un message :)

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